La synthèse protéique cell-free fonctionne avec du matériel génétique tel que l’ADN plasmidique mais elle peut également être réalisée à partir de séquences d’ADN linéaires amplifiées par PCR. Lors des premiers essais d’expression cell-free à partir de fragments PCR, il est vrai que les rendements d’expression étaient beaucoup plus faibles que ceux issus d’ADN plasmidique. Ceci était dû à l’activité DNase, présente dans l’extrait issu de cellules bactériennes, qui diminuait la durée de vie de l’ADN linéaire.

Néanmoins, comme la production de protéines à partir de fragments PCR offrait des perspectives de grande rapidité, en raison de l’élimination des étapes de clonage, de criblage et de sélection, plusieurs approches ont été étudiées pour améliorer la productivité en réduisant la dégradation linéaire de l’ADN ou en stabilisant l’ARNm (Lee et al., 2018 ; Schinn et al. 2016).

Aujourd’hui, les systèmes cell-free obtiennent des rendements similaires à partir d’ADN plasmidiques comme de fragments PCR.

L’une de ces approches a consisté à retirer le gène codant pour l’endonucléase I et l’exonucléase V, deux nucléases majeures agissant sur l’ADN double brin du génome de la souche E. coli utilisée pour la préparation des extraits cellulaires (Michel-Reydellet et al., 2005). Dans cette approche, le gène endA codant pour l’endonucléase I a été supprimé et l’opéron recCBD, qui fait partie du système de recombinaison d’E. coli et code pour l’exonucléase V, a été remplacé par le système de recombinaison du phage lambda Red. Ces modifications génétiques n’ont pas affecté le taux de croissance bactérienne et elles se sont traduites par une nette augmentation de la stabilité du produit PCR. Ainsi, la chloramphénicol acétyltransférase (CAT) a, par exemple, pu être produite avec des rendements de 500 à 600 μg/mL à partir de fragments PCR ; rendements similaires à ceux obtenus à partir de plasmides recombinants.

D’autres approches utilisant des ADN linéaires ont également permis d’améliorer cette productivité: l’ajout de la protéine Gam du bactériophage lambda, par exemple ou l’utilisation d’un inhibiteur de la protéine RecBCD (Sitaraman et al., 2004) ou encore l’introduction de chi- sites dans l’ADN linéaire. Comme la RecBCD s’arrête sur les chi-sites d’ADN dans le cadre de la recombinaison homologue (Marshall et al., 2017), les deux stratégies ont augmenté la stabilité de l’ADN linéaire dans l’extrait cellulaire bactérien.

Une approche encore différente vise à prolonger la durée de vie de l’ARNm pour augmenter la productivité lors de l’utilisation de fragments PCR. En préparant un extrait cellulaire, dépourvu d’activité RNase E et en introduisant une structure en boucle à l’extrémité 3’ de l’ARNm (Ahn et al., 2005), l’ARNm a été protégé des endonucléases et des exonucléases, la demi-vie de l’ARNm a ainsi considérablement augmenté et sa traduction s’est produite malgré la dégradation rapide du modèle ADN. Au final, la CAT a été produite à 685 μg/mL, un rendement comparable à celui observé lors de l’utilisation d’ADN plasmidique.

Ainsi, les stratégies ayant permis la stabilisation des fragments PCR ont permis leur utilisation dans les systèmes cell-free, sans perte de rendement, rendant ces derniers extrêmement performants et rapides pour l’expression haut débit de banques de gènes ou de librairies de mutants, sans avoir à passer par les étapes de biologie moléculaire de sous-clonage, de sélection, d’amplification et de purification de constructions plasmidiques.

Il en résulte qu’un grand nombre de protéines peuvent à présent être rapidement produites à partir de fragments PCR linéaires, dans de très petits volumes réactionnels, tels que des plaques au format 384 puits. Ces protocoles peuvent être automatisés à l’aide de robot de manipulation de liquides mais peuvent également être exécutés manuellement tout en offrant un débit d’expression élevé.

Authors & sources

Ahn J.H., Chu H.S., Kim T.W., Oh I.S., Choi C.Y., Hahn G.H., Park C.G., Kim D.M. 2005. Cell- free synthesis of recombinant proteins from PCR-amplified genes at a comparable productivity to that of plasmid-based reactions. Biochemical and Biophysical Research Communications 338:1346–1352.

Lee K.H., Kim D.M. 2018. Recent advances in development of cell-free protein synthesis systems for fast and efficient production of recombinant proteins. FEMS Microbiology Letters 365(17):1-7.

Marshall R., Maxwell C.S., Collins S.P., Beisel C.L., Noireaux V. 2017. Short DNA containing chi sites enhances DNA stability and gene expression in E. coli cell-free transcription-translation systems. Biotechnology and Bioengineering 114:2137–2141.

Michel-Reydellet N., Woodrow K., Swartz J. 2005. Increasing PCR Fragment Stability and Protein Yields in a Cell-Free System with Genetically Modified Escherichia coli Extracts. Journal of Molecular Microbiology and Biotechnology 9:26–34.

Schinn S.M., Broadbent A., Bradley W.T., Bundy B.C. 2016. Protein Synthesis Directly from PCR: Progress and Applications of Cell-Free Protein Synthesis with Linear DNA. New Biotechnology 33(4):480-7.

Seki E., Matsuda N., Yokoyama S., Kigawa T. 2008. Cell-free protein synthesis system from Escherichia coli cells cultured at decreased temperatures improves productivity by decreasing DNA template degradation. Analytical Biochemistry 377:156–161.

Sitaraman K., Esposito D., Klarmann G., Le Grice S.F., Hartley J.L., Chatterjee D.K. 2004. A novel cell-free protein synthesis system. Journal of Biotechnology. 110(3):257-63.

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